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À l’abri !

L’arbre creux comme structure d'accueil pour de nombreuses espèces

Julie Hesse

L’arbre creux n’est pas un arbre mort.
Tombé comme debout, à l’horizontale comme à la verticale, allongé comme érigé, l’arbre creux abrite en son sein un grand nombre d’espèces de taille et de mode de vie différents.

Pour toutes ces espèces qui choisissent de s’installer ou seulement de s’abriter dans ces cavités pour quelque temps, l’arbre représente un refuge ou un foyer, un abri ou un nid…

Chacune joue un rôle spécifique dans le processus d’évolution de la cavité. Aux champignons qui dévorent la première blessure, aux vers qui apparaissent, aux oiseaux qui les picorent et qui viennent se nicher au cœur du tronc. Au fur et à mesure, d’autres espèces viendront habiter le creux.

Un pivert, une mésange, un ver, des champignons lignicoles, un groupe de chauves-souris et trois rats se retrouvent ensemble dans ce platane.

Toc toc ? Il y a quelqu’un ?

On pense souvent que les arbres morts ou mourants ne valent pas la peine d’être préservés. Pourtant, ces arbres « à cavités » fournissent nourriture, abri et sécurité à plusieurs oiseaux, mammifères ou insectes.

Les arbres à cavités sont des arbres morts ou mourants qui ont un ou plusieurs trous dans leur tronc ou dans leurs branches principales. Ces cavités se retrouvent aussi dans certains arbres en santé. Les cavités sont souvent creusées par les oiseaux, souvent des pics qui recherchent des insectes présents dans le bois. Elles peuvent aussi être causées par la pourriture et des branches cassées.

Les cavités ne se ressemblent pas toutes. La grosseur, la forme et l’emplacement des cavités déterminent l’utilisation choisie par la faune : elles peuvent servir pour faire un nid ou élever des petits, pour se protéger ou pour dormir ou pour se nourrir.

Les Platanes taillés, très présents sur notre territoire, présentent très souvent des cavités. La collectivité essaie de les préserver tant qu’ils ne présentent pas de menace de chute sur l’espace public. En 2013, quasiment 500 Noctules (espèce de Chauve-souris) avaient été découvertes dans un Platane abattu. Depuis, la collectivité a mis en place une charte pour une meilleure prise en compte des chauves-souris pouvant être présentes dans les arbres à cavités.

Dernier grand parc strasbourgeois, le parc du Heyritz a été inauguré en 2014. Le parc a conservé le caractère naturel des lieux : sur le 8,7 ha (dont 1,5 ha de bassins), certains espaces boisés restent inaccessibles pour assurer la tranquillité de la biodiversité locale, et le bassin est mis en valeur grâce au ponton flottant de 300 m de long agrémenté d’îlots de végétation flottants. Le parc, comme les autres grands espaces verts strasbourgeois, est éteint la nuit afin de limiter la pollution lumineuse et préserver la trame nocturne.

Sa création s’est faite en concertation avec les usagers (riverains, conseils de quartier…) grâce à la mise en place d’un atelier de projet. Le bureau d’études « Villes et Paysages » en est le concepteur en association avec « EGIS France » et « Les Éclaireurs ». Le projet a été lauréat du Grand Prix de l’Aménagement urbain en 2015.

Trois concepts animent le parc :
– de la terre à l’eau, un fil conducteur guide les promeneurs depuis les jardins familiaux jusqu’à la promenade des berges ;
– s’amuser, la création d’un pôle « sport et loisirs » à l’Ouest ;
– se rencontrer, la création d’une zone d’animation à l’Est.

« Écosystème : Ensemble formé par une communauté d'êtres vivants, animaux et végétaux, et par le milieu dans lequel ils vivent. », définition proposée par le CNRTL.

Tous les habitants du platane agissent ensemble pour créer et faire vivre l’habitat.

Les relations qu’entretiennent les arbres avec les champignons ne sont pas des relations faciles. Elles peuvent être qualifiées de symbiotiques, c’est-à-dire une association durable avec un ou plusieurs autres organismes et profitable à chacun d’eux, pourtant, le plus souvent, le champignon est présenté comme un parasite pour l’arbre.

Les champignons sont des organismes appelés hétérotrophes : ils ne peuvent pas produire seuls ce dont ils ont besoin pour vivre, se développer et se reproduire. Dans le cas spécifique des champignons lignicoles, ceux-ci dépendent des arbres pour survivre. Ils attaquent la matière végétale vivante, ici le bois, pour se nourrir d’elle et du carbone qu’elle rejette. Les champignons lignicoles attaquent des arbres souvent déjà affaiblis, ils s’immiscent au travers de la barrière végétale par le biais de blessures plus ou moins grandes, causées par exemple par des animaux ou le bris d’une branche, ou par le biais d’insectes qui les transportent. Leur prolifération trop importante peut avoir des effets dévastateurs sur l’écosystème d’un lieu : ils peuvent diminuer les ressources présentes dans un milieu, bouleverser ses conditions de vie, le rendant invivable pour certaines espèces déjà implantées.

Néanmoins, les champignons lignicoles sont cruciaux dans la stabilité à long terme d’autres écosystèmes. Ils sont considérés, au même titre que les vers de terre, comme des décomposeurs : en se nourrissant des déchets et des matières mortes, ils jouent un rôle actif dans le recyclage et la répartition de certains éléments, notamment des minéraux et assurent ainsi la fertilité et la pérennité des milieux et des sols. Ils sont également considérés comme étant un des principaux recycleurs de carbone organique.

En créant des cavités, ils créent également de nouveaux micro-habitats riches en biodiversité. En ville, on peut par exemple y observer des rongeurs, des oiseaux communs et même des chauves-souris. En 2013, la ville de Strasbourg a eu la malheureuse surprise de découvrir une immense colonie de près de 500 Noctules communes, une espèce de chauve-souris rare et protégée, nichées dans un très vieux platane qui venait d’être abattu. Rassurez-vous, elles ont quasiment toutes étaient sauvées !

Le pivert creuse un trou en essayant d’attraper un ver et blesse le platane, le ver aide le champignon à entrer, le champignon creuse la cavité petit à petit, le champignon et le ver recyclent la matière, la mésange est la première à s’installer, puis toutes les chauves-souris, et enfin les rats. Les rats essayent de manger le ver, qui remonte à la surface, et tout recommence.