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En marge

L'obscurité comme refuge

Apolline Floc'h

La thématique de la trame noire fait ici l’objet d’un atlas non exhaustif des animaux vivant la nuit, tout en créant un parallèle avec les personnes marginalisées, comme une passerelle entre biodiversité et enjeu social.

Dessiner à même le sol et utiliser les pochoirs reprend la technique de la fresque, et permet, par une économie de temps et de moyens, de réduire la production de déchets lors de la mise en œuvre du projet. On peut remarquer que cette fresque ne se voit qu’en plein jour, elle reste invisible la nuit aux yeux des éventuel.les passant.es. Elle renvoie aux peintures pariétales, la nuit ayant une part de mystère dans l’imaginaire collectif, ce qui explique le choix de formes presque naïves, du côté de l’onirisme et du sensible plus que d’un vocabulaire graphique naturaliste.

Trame noire, trame nocturne… De quoi parle-t-on ? Pour le comprendre, il est nécessaire de présenter l’outil de prise en compte de la biodiversité en aménagement et urbanisme : la trame verte et bleue (ou TVB). Ce concept identifie et protège les réservoirs de biodiversité, et les corridors qui permettent de les relier directement ou non. Ces espaces doivent permettre aux espèces de XX leur cycle de vie : se nourrir, se déplacer et se reproduire. Mais lors de l’élaboration de l’outil, les humains que nous sommes ont oublié qu’un grand nombre d’espèces vivait… la nuit. Et que l’obscurité leur était nécessaire. Ainsi, depuis quelques années émerge un nouveau concept, la trame noire, ou nocturne, ou sombre. De la même manière que pour la TVB, elle consiste à identifier des réservoirs et des corridors pour la biodiversité où la pollution lumineuse serait absente ou très fortement minimisée. Sur une planète de plus en plus éclairée où les lumières se voient de l’espace, le challenge est de taille…

La Ville et l’Eurométropole de Strasbourg travaillent à identifier la trame nocturne sur leur territoire, en collaboration avec les communes volontaires. Des plans d’action spécifiques sont en construction pour lutter contre la pollution lumineuse et ses impacts sur la biodiversité locale.

Dernier grand parc strasbourgeois, le parc du Heyritz a été inauguré en 2014. Le parc a conservé le caractère naturel des lieux : sur le 8,7 ha (dont 1,5 ha de bassins), certains espaces boisés restent inaccessibles pour assurer la tranquillité de la biodiversité locale, et le bassin est mis en valeur grâce au ponton flottant de 300 m de long agrémenté d’îlots de végétation flottants. Le parc, comme les autres grands espaces verts strasbourgeois, est éteint la nuit afin de limiter la pollution lumineuse et préserver la trame nocturne.

Sa création s’est fait en concertation avec les usagers (riverains, conseils de quartier…) grâce à la mise en place d’un atelier de projet. Le bureau d’études « Villes et Paysages » en est le concepteur en association avec « EGIS France » et « Les Éclaireurs ». Le projet a été lauréat du Grand Prix de l’Aménagement urbain en 2015.

Trois concepts animent le parc :
– de la terre à l’eau, un fil conducteur guide les promeneurs depuis les jardins familiaux jusqu’à la promenade des berges ;
– s’amuser, la création d’un pôle « sport et loisirs » à l’Ouest ;
– se rencontrer, la création d’une zone d’animation à l’Est.

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